Je ne comprends toujours que le début de presque tout ce qui arrive. Bientôt, je fus empêtré dans différentes couches de débuts de compréhension dont je ne savais plus dire ce qu'ils étaient censés m'expliquer. Jusqu'à ce jour, je cesse de comprendre, plus exactement, je tombe dans une humeur d'attente enfantine lorsque le degré de complication devient trop élevé et que j'ai besoin d'un nouveau début de compréhension. Le problème, c'est l'énorme quantité de choses qui s'entassent dans mon esprit et dont je n'ai compris que le début. Je marche dans l'herbe sèche de la rive, devenue presque cassante sous l'action du soleil. Enfant, je parcourais le terrain seul ou avec deux amis et, pendant des demi-journées entières, je ne sentais rien que le doux contact des herbes contre mes genoux. Je faisais attention à ne pas frôler des orties, j'aimais le mot rhubarbe et je commençais à me nourrir d'oseille et de pissenlits. Dès que je me promenais ici, je plongeais dans un ravissement intérieur que je ne trouvais nulle part ailleurs. Car je n'avais pas besoin de comprendre l'herbe autour de moi.
Wilhelm Genazino, Un parapluie pour ce jour-là (tr. Anne Weber)