Elle se lève à 7 heures et allume la radio. Après s'être habillée, elle lève les enfants et prépare le petit déjeuner. À 8 heures, il lui faut conduire notre fils à l'arrêt du bus scolaire. À son retour, elle doit tresser les cheveux de Carol. Je quitte la maison à 8 heures et demi, mais je sais que chacun des gestes d'Ethel, durant le reste de la journée, sera déterminée par le ménage, la cuisine, les commissions et les besoins des enfants. Je sais que, le mardi et le jeudi, elle se trouve au A & P entre 11 heures et midi, que, chaque après-midi de beau temps, elle est assise sur un certain banc dans un square; qu'elle fait le ménage le lundi, le mercredi et le vendredi, et qu'elle polit l'argenterie lorsqu'il pleut. Quand je rentre, à 6 heures, elle est généralement occupée à éplucher les légumes ou à préparer à dîner. Puis, une fois que les enfants ont mangé et pris leur bain, lorsque le dîner est prêt, que les plats et les assiettes sont disposés sur la table du salon, elle demeure immobile au milieu de la pièce comme si elle avait oublié quelque chose, et ce moment de réflexion est si profond qu'elle n'entend pas si je lui parle, ou si les enfants l'appellent. Puis c'est fini. Elle allume les quatre bougies blanches dans leurs chandeliers argentés, et nous nous asseyons devant un souper de hachis de corned-beef, ou quelque autre plat modeste.
John Cheever, « La saison des divorces » (tr. Dominique Mainard)